Livereview: Irréversible Festival 2018

26. Mai 2018, Monthey
By Alexandre P.
Ce samedi 26 mai 2018, la deuxième édition de l’Irréversible Festival à Monthey se terminait en beauté avec un second jour consacré au metal sous toutes ses formes. Pas moins de 9 groupes présents pour enchainer en alternance sur deux scènes pendant 8 heures.

Situé comme l’an passé dans la zone industrielle des Ilettes, l’Irréversible est le premier open air de la saison en Suisse romande et surtout le seul de la région à mettre autant en avant le metal.


Flayst
Avec quelques minutes d’avance sur le planning, l’inusable Duja annonçait Flayst, le premier groupe à fouler la seconde scène. Encore clairsemée, la masse de festivaliers ne s’est pas faite prier pour venir sous la tente, d’abord parce qu’il commençait à pleuviner, et surtout parce que le son des Romands était énorme. Rarement, un groupe lancé en pâture en fin d’après-midi dans un festival a pu bénéficier d’une puissance sonore pareille. C’était maîtrisé et costaud du début à la fin. Première bonne surprise de la soirée.


Caliban
La pluie s’est bien intensifiée et il faut désormais retrouver la grande scène en plein air car Caliban va démarrer son set. Les Allemands sont de bonne humeur, contents d’être là et n’en ont juste à rien à cirer qu’il pleuve. Le public a bien suivi aussi alors comme ils disent si poétiquement « Fuck The Rain » ! Emmené depuis maintenant plus de 20 ans par Andreas Dorner, le groupe de metalcore joue fort. La voix est superbe et le chanteur est très à l’aise sur scène. Après quelques chansons, il se trempe très solennellement les cheveux dans une flaque sur le devant de la scène, avant de repartir sautiller en chantant pendant que le public lance un circle pit. Quelle énergie avec un set d’une heure consacré principalement à leurs deux derniers albums, dont le tout récent « Elements ». Pas dénué d’humour non plus, car en fin de set, ils ont fait une reprise de Rammstein avec « Sonne », qui, à défaut d’avoir ramené le soleil, a au moins permis à la pluie de s’arrêter. L'an prochain on renomme le festival l'insubmersible!


Tyrmfar
Sur la deuxième scène, ce sont les locaux de Tyrmfar qui prennent le relais avec un set black metal joué avec passion, quoi que sans le maquillage panda de rigueur pour ce genre de musique. Le groupe avait annoncé peu avant que ce serait leur dernier concert avec leur chanteur actuel. Personnellement, je n’ai pas trop accroché et comme il faut bien se nourrir à un moment ou à un autre, j’en ai profité pour aller manger. L’avantage de jouer fort c’est que cela s’entend de loin, y compris depuis les tables des stands de nourriture. Et je dois dire que le set Tyrmfar sonnait vraiment mieux une fois que j’avais quitté le devant de la scène où je m’étais d’abord tenu pour les photos. Les amateurs de Black semblaient très contents de cette prestation et c’est bien là le principal.


No One Is Innocent
Première grosse tête d’affiche avec No One Is Innocent. Je les avais vu l’an passé sur la grande scène de Rock Oz’Arènes et j’avais été bluffé par leur énergie. Ce soir, sur le sol valaisan, ils sont tout aussi remuants dès les premières notes de « Djihad Propaganda ». Le soleil est revenu en plus (merci Caliban !), donc tout est parfait pour un set d’une heure qui a semblé bien court. Kemar et les One sont en tournée pour promouvoir leur album Frankenstein donc on a eu droit à de nombreux extraits de celui-ci, notamment un magnifique titre en hommage à Mohamed Ali. Depuis ses débuts il y a plus de vingt ans, le groupe est toujours engagé socialement et le premier à dénoncer les injustices. Pas étonnant ainsi de les voir emprunter aux Bérurier Noir le fameux extrait de « Porcherie » : la Jeunesse emmerde le Front national, pour l'intégrer à leur « Nomenklatura ». Trente ans après sa sortie, ces paroles sont toujours d’actualité, les générations Le Pen n’ayant connu aucune amélioration. Probablement le groupe le moins heavy sur scène ce soir, les français ont quand même bien musclé le set en mettant l’accent sur les guitares. Niveau communication, rien à redire. On voit que l'ambiance dans le groupe est bonne et avec le public francophone cela passe toujours bien. Il y a même un gars du public qui a tant attiré l'attention que Kemar est descendu lui tendre le micro pour qu'il annonce bien fort le nom du nouvel album. Evidemment, cela ne pouvait pas terminer autrement : on a eu droit au classique « La Peau » en fin de set et les No One sont sorti de scène sous de nombreux applaudissements.


Cold Night For An Alligator
Sur la seconde scène, ce sont les Danois de Cold Night For An Alligator qui enchaînent. J’en avais jamais entendu parler avant qu’ils annoncent leur venue à l’Irréversible. Visiblement, je ne suis pas le seul car la foule est clairsemée. Sous leur air sympa d’étudiants en architecture, ce sont pourtant des musiciens redoutables avec un chanteur investi qui a déjà une présence incroyable sur scène. Très technique, leur musique est puissante et l’exécution impeccable. On m’expliquera après coup que dans leur pays, ils ont déjà un sacré parcours et jouissent d’une certaine notoriété. Ce soir, ils doivent un peu avoir eu l’impression de recommencer de zéro et pourtant ils la jouent à fond. Un groupe que l’on devrait revoir prochainement je l’espère.


Tesseract
Appelé avec Caliban pour remplacer la défection de Monuments, Tesseract est arrivé à Monthey complétement jetlagué de New York où ils terminaient leur tournée américaine. Les anglais ont néanmoins su passer outre pour donner une superbe prestation. Leur metal progressif, très technique lui aussi, ne laisse guère de place à l’approximation et le rendu a été grandiose. Heureusement que sur le plan musical c’était autant réussi car pour ce qui est de la partie visuelle, c’était le calme plat. Pas de véritable backdrop, pas de jeu de lumière, pas de mouvements sur scène, rien. Autant vous dire que le jour où ils sortent une captation live d’un concert, pas besoin d’acheter le dvd, le cd suffira. Le chanteur a un peu communiqué avec le public, notamment pour dire que s’ils étaient contents d’être bientôt de retour à la maison, ils étaient néanmoins ravis d’être là. Il a également promis que le groupe allait ensuite se mettre une caisse au bar pour fêter la fin de la tournée. Je ne sais pas si cela a eu lieu, mais en tous les cas, pari réussi de la programmation qui a trouvé avec Caliban et Tesseract deux solutions de remplacement qui ont bien fait oublier l’absence de Monuments.


Promethee
Reprise des hostilités immédiate sous la tente avec les genevois de Promethee pour le set le plus heavy du weekend (certes je n’étais pas là le vendredi, mais je doute fort qu’un artiste du premier jour ait pu proposer plus costaud que Promethee). Dix ans qu’ils écument les scènes de Suisse et désormais du monde entier, les genevois sont à Monthey ce soir sans leur nouvel album (prévu pour cette année), mais le toujours bien renseigné Duja nous promet trois nouveaux titres en primeur dans son speech d’introduction. Le temps d’éteindre les lumières, de brancher les strobs et c’est parti pour une petite heure d'un hardcore super heavy. Le public est ravi et si les gens sont sous la tente de la petite scène, ce n’est pas à cause de la pluie qui n’a pas repris, mais bien parce que la performance est superbe. Il faut dire aussi qu’après Tesseract, il était un peu nécessaire de passer à quelque chose de puissant avec des musiciens pour qui "avoir de la retenue" n'a aucune signification.


Eluveitie
Dernier groupe sur la grande scène, Eluveitie lançait ce soir sa tournée des festivals européens. Chaque fois que je vois notre groupe préférée de folk metal, j’ai l’impression qu’il y a des musiciens supplémentaires. Faut dire qu’après l’important changement de line-up intervenu en 2016, il y a encore eu une nouvelle arrivée l’an passé avec Fabienne Erni, dont la présence et l’apport musical sont indéniables. Certes le côté rugueux des compositions existe toujours, mais le fait d’avoir plusieurs musiciennes capables d’assurer des parties vocales contrebalance magnifiquement le chant caverneux de Chrigel. Quand je dis que j'ai l'impression qu'il y a chaque fois plus de musiciens sur scène, c'est pas tout à fait vrai car pour ce soir, pas de trace du bassiste ! Visiblement pas un problème car une bande fait l'affaire (ou un roadie derrière le rideau ?). Le show démarre bien avec un bon son, mais rapidement, on constate que certains instruments sont très discrets dans le mix, en particulier le hurdy gurdy. Pas facile de faire cohabiter autant de musiciens sur scène! Le dernier album d'Eluveitie, Evocation II, sera revisité avec notamment "Epona" et "Lugus", mais au final pratiquement chaque album sera représenté dans la setlist. Pour ma part, le meilleur passage du set se situe au milieu avec un bel enchainement "Quoth The Raven", "Call Of The Mountains" et "A Rose For Epona" Comme souvent, le leader s’essaiera à quelques mots de français et comme souvent il s’arrête assez vite pour achever sa première phrase déjà en anglais. Ce soir, il s’est arrêté à « Mesdames Messieurs ». Le public ne lui en tient pas en rigueur (on s’imagine deux secondes sur scène à Winterthur pour s’adresser en dialecte au public local ?) et il aura même droit à Happy birthday pour son anniversaire qu’il fêtait ce soir. Le rappel sera sans surprise constitué du nouveau single "Rebirth" et de l'inusable "Inis Mona" qui mettent tout le monde d'accord : très bon concert de nos compatriotes ! La bonne nouvelle c’est que la saison des festivals vient juste de commencer et que le groupe reviendra à plusieurs reprises sur les scènes suisses, que ce soit à Caribana, au Z7 Summer Nights ou encore à Gampel pour n’en citer que quelques-unes.