L'an passé, le Paléo festival avait eu la bonne idée de
consacrer une soirée entière au metal avec Iron Maiden et The Raven
Age sur la grande scène, ainsi que Prométhée, Steve N'Seagulls (et
ses reprises redneck de tubes heavy) ou encore Eluveitie sur les
scènes secondaires.
En 2017, rien de tel
malheureusement, mais quand même une soirée bien rock, avec les Red
Hot Chili Peppers et deux ovnis venus tout droit de France voisine :
The Inspecteur Clouzo et Carpenter Brut.
Les RHCP à Nyon,
c'est l'événement 2017, le concert dont tout le monde rêve depuis
des années et dont tout le monde parle depuis son annonce au mois
d'avril lorsque la programmation a été dévoilée.
Selon les
propres déclarations des programmateurs, c'est après des années
d'efforts et après avoir fait les yeux doux au management du groupe
en lui présentant le site l'an passé, que le rêve californien est
devenu réalité. Belle victoire qui mérite d'être saluée car le
groupe fait des festivals bien plus imposants en Europe cet été.
Après une journée entière sous un soleil de plomb, que les plus
courageux ont bravé en s'accrochant aux crash barrières des heures à
l'avance afin d'être aux premières loges, c'est une masse très
compacte qui fait face à la scène et attend le début d'un concert
déjà (trop?) annoncé comme mythique et dont le départ a été fixé à
23.30.
Ne respectant rien, ni la traditionnelle annonce du
speaker et encore moins l'horaire pourtant d'habitude très rigide
(on est en Suisse quand même), c'est avec bien dix minutes d'avance
que Flea, Chad et Josh débutent une jam dès leur entrée sur scène.
Quelques minutes pour se chauffer les doigts et voilà que Kiedis les
rejoint pour lancer Can't Stop. Pour un démarrage en douceur, faudra
repasser. Devant, cela bouge beaucoup et l'espace vient vite à
manquer. Heureusement, le groupe enchaîne rapidement avec deux
morceaux plus calmes Snow Hey Ho et Scar Tissue qui permettront aux
premiers rangs de souffler un peu, voire de retrouver ses
chaussures.
Kiedis n'a pas l'air très satisfait de ses
retours et fera de grandes signes à son équipe jusqu'à obtenir la
correction souhaitée. Depuis la fosse, le son est vraiment bon (à
défaut d'être fort) et le groupe est impressionnant de vivacité.
Cela bondit, court saute, se trémousse, enfin sur scène car dans le
public hormis les premiers rangs, cela restera sagement tranquille.
Comme souvent, le mélange digestion continue, consommation exagérée
et soleil éclatant a déjà bien calmé un public presque apathique.
Certes, la voix n'est pas d'une justesse folle, mais cela a
toujours été comme cela avec les Red Hot et ce qu'il lui manque dans
la voix, Kiedis le compense aisément avec son énergie.
Le
petit jeune, ou le dernier arrivé selon votre préférence, c'est Josh
Klinghoffer, le guitariste qui avait mis son beau t-shirt du CERN et
qui, le pauvre, a la tâche impossible de faire oublier John
Frusciante (parti il y a déjà plus de dix ans s'enterrer dans des
projets solos si abstraits que même sa maman n'arrive pas à
écouter). Et bien malgré, plus de dix ans au compteur à piments, il
faut constater que ce jeune homme est toujours loin du compte. Sur
disque, son apport est correct, mais en concert, il peine, malgré
ses efforts indéniables, et quand il veut y mettre du sien, c'est
pour une version bien étrange de Californication qui lui attirera
les foudres d'une partie du public. S'il ne bouge pas trop le
spectateur du Paléo n'accepte pas pour autant que l'on abîme les
classiques promis à ses oreilles.
Après un inattendu et rare
Wet Sand, le groupe joue une bonne minute de I Wanna Be Your Dog
(Iggy Pop) qui se transforme rapidement en Me And My Friends, un des
premiers classiques live des RHCP, qui faisait les beaux jours de
leurs concerts il y a près de 30 ans en arrière et qui est toujours
régulièrement joué.
Avec une setlist assez différente chaque
soir de cette tournée estivale, le groupe voyage entre ses nombreux
albums au gré de ses envies. Il faut dire que son répertoire est tel
qu'il peut même se payer le luxe de zapper un titre aussi majeur
qu'Under The Bridge, sans que personne ne crie au scandale.
La fin de set est épique avec un Suck My Kiss qui prend toute sa
dimension en concert, puis Soul To Squeeze et By The Way.
Kiedis a bien entendu tombé la casquette puis son tee shirt depuis
longtemps lorsque le groupe revient pour le rappel. Ce sera d'abord
un bout du morceau de Nick Cave sur le boson de Higgs découvert au
CERN (et joué ici même par son auteur 4 plus tôt lors d'un concert
mémorable). Pas de doute Josh Klinghoffer a du s'arrêter visiter le
CERN sur la route du Paléo. Puis, deux titres uniquement, d'abord le
récent Goodbye Angels , jolie mélopée trop gentille qui illustre
bien le problème de The Getaway, trop mou (mais dont 5 titres seront
joués ce soir) et enfin le classique Give It Away dont je ne me
lasserai jamais. Un titre monstrueux qui a réussi à imposer les RHCP
aux début des années 90s alors que Nirvana, Metallica, Faith No More
et Guns N'Roses étaient à leur apogée et ne laissaient que des
miettes aux autres Dommage, on en aurait bien voulu encore un peu,
mais après un titre pareil, impossible de suivre sans faire retomber
la sauce (ah voilà enfin la métaphore culinaire obligatoire).
Pour avoir vu les RHCP en 96 avec Dave Navarro et en 99 avec
John Frusciante, il ne fait aucun doute que Josh Klinghoffer n'est
pas du même acabit. En attendant de trouver mieux, il fait le
boulot, mais sans plus.
Dès le lendemain, les critiques sont
tombées sur ce concert avec plus ou moins de férocité. Etonnant car
si ce n'est pas le concert de l'année, c'est quand même un petit
événement de faire venir les RHCP à Nyon et ce concert de la soirée
d'ouverture 2017 était plus que plaisant à défaut d'être monstrueux.
Ceux qui étaient à proximité de la scène ont pu en prendre plein les
yeux et les oreilles. Forcément, les autres pas trop
malheureusement. Cela fait plus de 20 ans que l'on dit que Anthony
Kiedis chante faux, cela n'allait pas s'améliorer juste pour Paléo.
Les RHCP sont venus avec leurs qualités et leurs défaut pour un set
authentique de 90 minutes (on est loin des 70 minutes de la tournée
Californication) et ceux qui s'en étonnent ne les ont probablement
jamais vus avant leur venue à Paléo. Ceux qui suspectent du playback
sont bien à côté de la plaque, car quitte à faire du playback alors
autant prendre une bande avec des vocales de meilleure qualité.
Sinon, les petits délires instrumentaux entre Flea et Josh au début
de la plupart des morceaux rendent très vite caduques toutes les
théories du complot playback. A noter enfin que depuis plusieurs
années déjà, chaque concert est enregistrée et peut être acheté peu
après officiellement. Il sera donc possible de réécouter la
prestation nyonnaise pour tous ceux qui veulent se faire un deuxième
avis ou tout simplement se faire plaisir en se remémorant cette
soirée.
Avant les RHCP, on a pu voir un concert au Club Tent
du groupe français Carpenter Brut. Oui, Carpenter
comme John Carpenter, le maître du film fantastique et
d'anticipation. Basé sur un concept assez dingue, ce groupe joue une
musique constituée d'un savant mélange de bande-son de film eighties
avec une électro plus moderne et surtout des riff de guitare heavy
metal. Le tout dans une obscurité rougeâtre (impossible à
photographier, en plus sans accès à la fosse pour ce concert) avec
en arrière-fond des projections d'extraits de films (notamment le
clip de la chanson Hot Night (BO de Ghostbusters) curieusement
sous-titrée en espagnol), pour un ensemble assez bien ficelé. Un
chouette délire à voir dans le cadre d'un festival, mais pas
forcément en tête d'affiche.
Autre surprise de ce mardi soir,
la présence sur la grande scène de The Inspector Clouzo
pour un rock blues agricole qui fricote allégrement avec le hard
rock. Les deux français, éleveurs dans le civil dans un coin
(forcément) perdu des Landes, n'ont qu'une batterie et une guitare
(une gibson SG comme Angus Young quand même) pour s'accompagner,
mais remplissent malgré tout facilement tout l'espace qui leur est
accordé et parviennent à rassembler pas mal de monde devant la
grande scène à une heure où le soleil cogne aussi fort que le
batteur et
son faux air de Super Dupont. A première vue, on les
imagine être venus en tracteur boire des coups chez les collègues de
Nyon, mais c'est bien deux musiciens talentueux et sympathiques qui
ouvraient la grande scène ce soir avant Foals et les RHCP. A
découvrir ou à suivre.
Foals, dont je connaissais très mal le
répertoire s'est en revanche avéré un peu mou du genou pour occuper
dignement la scène entre The Inspecteur Clouzo et les Red Hot.
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